Cinq enseignements clés de la COP29 et la voie à suivre
Deux semaines se sont écoulées depuis la clôture de la COP29 à Bakou, en Azerbaïdjan. La conférence annuelle sur le climat s'est achevée sur les habituels défis de dernière minute et a mis en évidence un mélange de progrès, de frustration et de besoin urgent d'action.
En amont de la conférence, Clean Air Task Force (CATF) a appelé les dirigeants mondiaux à envisager six recadrages essentiels pour l'action climatique. Avec des enjeux élevés et des espoirs encore plus grands, la conférence de cette année a mis en lumière les défis permanents entourant les questions récurrentes clés, notamment l'établissement d'un marché international du carbone, l'atténuation du méthane et le financement du climat, tout en exposant les lacunes persistantes dans la coordination et la mise en œuvre au niveau mondial.
Maintenant que la conférence est derrière nous et que la date limite pour les rapports biennaux de transparence et les contributions nationales déterminées actualisées approche à grands pas, voici les cinq principaux enseignements que CATFa tirés de la COP29 et la façon dont ils déterminent la voie à suivre jusqu'à la COP30 à Belém, au Brésil.
1. Négociations sur le financement du climat : Les progrès sont insuffisants, mais des opportunités subsistent
Le financement du climat a une fois de plus dominé l'ordre du jour de la COP, les nations s'interrogeant sur le montant de la contribution des économies développées pour soutenir les pays émergents et en développement dans la lutte contre le changement climatique. Résultat : un engagement de 300 milliards de dollars par an : Un engagement de 300 milliards de dollars par an, bien loin du chiffre de 1 300 milliards de dollars qui a dominé les discussions avant et pendant la conférence.
Le groupe des pays les moins avancés (PMA), qui représente 45 nations et 1,1 milliard de personnes, a condamné le résultat, tandis que l'Inde a carrément rejeté le texte sur le financement, officiellement connu sous le nom de Nouvel objectif collectif quantifié (NCQG) pour le financement de la lutte contre le changement climatique. Le texte "encourage" notamment les contributions supplémentaires d'autres pays, ce qui signifie que des pays comme la Chine et l'Arabie saoudite - des nations plus riches qui ne sont pas classées comme "développées" par les Nations unies - sont de plus en plus sollicités pour renforcer leurs engagements en matière de financement de la lutte contre le changement climatique.
Le texte final introduit une "feuille de route de Bakou à Belém pour 1,3T", qui vise à identifier les moyens de débloquer des milliers de milliards de dollars de financement pour le climat "par le biais de subventions, d'instruments concessionnels et d'instruments ne créant pas de dette". Mais la fixation d'un objectif de financement climatique ne représente que la moitié de la bataille. Les coûts d'investissement en Afrique s'élevant en moyenne à 15,6 %, soitplus du triple de ceux de l'Europe occidentale et des États-Unis, la levée de ces obstacles nécessitera des solutions innovantes telles que des garanties de la dette publique, des incitations fiscales et des échanges de devises afin de réduire les coûts et d'attirer les investissements.
2. Marchés mondiaux du carbone : Une étape importante et du pain sur la planche
Après près d'une décennie de négociations, la COP29 a vu une avancée sur l'article 6 de l'Accord de Paris. Ces nouvelles règles établissent un cadre pour l'échange de crédits carbone générés par la réduction ou l'élimination des émissions de gaz à effet de serre - une étape importante qui pourrait remodeler la façon dont les pays relèvent le défi climatique.
Mais le vrai travail reste à faire. La confiance dans les marchés et les crédits carbone s'est considérablement érodée, et CATF a souligné qu'une supervision solide est essentielle pour restaurer la confiance, garantir des avantages climatiques réels et empêcher la prolifération de crédits frauduleux. L'organe de surveillance de la CCNUCC devra garantir des normes rigoureuses et la transparence afin de s'assurer que les crédits carbone apportent de réels avantages climatiques, et non de vaines promesses. Ce marché mondial recèle un énorme potentiel pour canaliser les financements climatiques indispensables vers les économies émergentes et en développement, contribuant ainsi à combler le déficit de financement.
Au fur et à mesure que ces marchés prendront forme, CATF s'efforcera d'obtenir des crédits de premier ordre, en particulier pour le carbone forestier et l'élimination du carbone issu de la biomasse, afin de garantir que ces mécanismes favorisent une action significative en faveur du climat.
3. Le méthane fait l'objet de progrès décisifs, mais une mise en œuvre rapide est nécessaire
Le méthane, un puissant gaz à effet de serre dont le pouvoir de réchauffement est plus de 80 fois supérieur à celui du CO2 sur une période de 20 ans, est resté l'un des principaux thèmes de la conférence annuelle sur le climat. De nouveaux engagements ont été pris pour réduire les émissions de méthane dans les secteurs de l'énergie, des déchets et de l'agriculture, soutenus par des initiatives visant à améliorer les systèmes de mesure, de notification et de vérification (MRV). Les États-Unis, la Chine et l'Azerbaïdjan ont fait équipe pour organiser un sommet de haut niveau sur le méthane et d'autres polluants, au cours duquel ont été annoncées des mesures telles que la taxe sur le méthane des déchets récemment finalisée par les États-Unis, la feuille de route de l'Union européenne pour la réduction du méthane et la promesse de 5 millions de livres sterling du Royaume-Uni pour aider à réguler les émissions de méthane dans les pays à revenu faible et intermédiaire.
Lors de la réunion ministérielle sur l'engagement mondial en faveur du méthane, les pays ont réaffirmé leur objectif collectif de réduire les émissions de méthane d'au moins 30 % d'ici à 2030 par rapport aux niveaux de 2020. Lors de la réunion ministérielle, les pays ont également annoncé la déclaration sur la réduction du méthane et la gestion des déchets dans les CDN des pays d'Amérique latine et des Caraïbes. Cette déclaration, qui s'inscrit dans le droit fil de la déclaration sur la réduction du méthane provenant des déchets organiques, engage les pays de la région à réduire les émissions de méthane en intégrant des améliorations dans le secteur des déchets dans leurs plans climatiques 2025, en mettant l'accent sur la fermeture des décharges, l'amélioration de la collecte des données, la justice environnementale et les financements innovants.
CATF se fait depuis longtemps le champion de l'atténuation des émissions de méthane, l'un des moyens les plus rentables et les plus efficaces de ralentir le réchauffement à court terme. Les annonces faites lors de la COP29 constituent un pas dans la bonne direction, mais elles doivent être suivies d'une mise en œuvre à court terme.
4. Favoriser la collaboration mondiale pour la gestion du carbone
Les technologies de gestion du carbone, telles que le captage et le stockage du carbone, sont régulièrement intégrées dans les plans d'action climatique des pays du monde entier. Le défi de la gestion du carbone (CMC), lancé en 2023, est une initiative essentielle pour faire avancer ces efforts. Soutenu par 23 gouvernements, dont Bahreïn, le Kenya, la Mauritanie, le Nigeria et le Sénégal qui l'ont rejoint l'année dernière, le CMC vise à développer les technologies de gestion du carbone afin d'atteindre des objectifs climatiques ambitieux.
Lors de la COP29, le CMC a organisé une table ronde ministérielle avec des représentants de plus de 20 pays participants qui ont lancé un appel commun à l'action, soulignant la nécessité d'une plus grande collaboration internationale pour accélérer l'adoption des technologies de gestion du carbone. La réunion ministérielle a également mis l'accent sur des actions clés pour faire avancer les projets, y compris la résolution des problèmes de capacité et de financement.
Les pays du CMC poursuivent collectivement l'objectif de rendre opérationnels des projets capables de capturer ou de stocker 1 gigatonne de CO2 par an d'ici à 2030. Toutefois, pour atteindre cet objectif, il faudra que les ONG et l'industrie apportent une contribution importante à l'élaboration des cadres politiques et réglementaires et des accords multilatéraux pour faire progresser le partage des données spécifiques aux projets, ce que CATF a demandé lors d'une table ronde privée de haut niveau à Bakou. CATF appelle également à une participation accrue des États membres de l'UE tels que la France, la Pologne et l'Allemagne. Ces mesures seront essentielles pour infléchir la courbe du climat et faire en sorte que les technologies de gestion du carbone atteignent leur plein potentiel.
5. L'élan nucléaire s'intensifie avec 31 pays qui s'engagent à tripler leur capacité
Lors de la COP29, six pays supplémentaires ont signé la déclaration sur le triplement de l'énergie nucléaire, ce qui porte à 31 le nombre de pays s'engageant à tripler la capacité de production d'énergie nucléaire d'ici 2050. Les nouveaux signataires - le Salvador, le Kazakhstan, le Kenya, le Kosovo, le Nigeria et la Turquie - témoignent d'un élan croissant en faveur du nucléaire en tant que source d'énergie propre et solide.
Le triplement de la capacité nucléaire d'ici 2050 permettrait de fournir de l'électricité, de la chaleur et des combustibles sans carbone 24 heures sur 24 et d'accélérer le calendrier de décarbonisation d'une dizaine d'années. Notamment, les économies émergentes reconnaissent de plus en plus le potentiel du nucléaire pour améliorer l'accès à l'énergie et la sécurité énergétique. Cependant, l'expansion de l'énergie nucléaire nécessite des approches innovantes en matière de déploiement, de sécurité et de financement. Au cours de la COP29, les États-Unis se sont engagés à ajouter 35 gigawatts de nouvelle capacité nucléaire en 2035, offrant un cadre national détaillé d'actions clés pour atteindre cet objectif.
Dans le cadre de l'initiative "Nuclear Scaling" avec la Fondation EFI et la Nuclear Threat Initiative, CATF vise à catalyser et à construire un nouvel écosystème de l'énergie nucléaire afin d'atteindre 50 gigawatts ou plus d'énergie nucléaire propre, sûre et sécurisée par an d'ici les années 2030, soit une multiplication par dix du taux de déploiement actuel.
La route vers Belém
La COP29 a démontré que si des progrès sont possibles, ils sont rarement suffisants. La route qui mène à la COP30 à Belém exigera que l'on se concentre à nouveau sur la mise en œuvre, la responsabilité et le comblement des fossés entre les parties prenantes. Ce qui se passera d'ici là dépendra de la capacité des pays à préserver l'esprit du multilatéralisme et à faire en sorte que le processus de la COP continue à produire des progrès tangibles. Ce ne sera pas une mince affaire compte tenu de la complexité de l'année à venir, notamment l'émergence de nouveaux gouvernements, les conflits en cours et la pression exercée sur les relations géopolitiques par l'effritement des relations commerciales.
CATF sera sur le terrain à Belém en 2025, continuant à faire avancer les conversations et à plaider en faveur du progrès et de la mise en œuvre. Dans les mois à venir, nous suivrons la soumission des rapports biennaux de transparence, attendus pour la fin de l'année, et nous surveillerons les mises à jour des contributions déterminées au niveau national (CDN) avant l'échéance de février 2025.